Après les emprunts russes, les obligations chinoises périmées font l'objet de curieuses rumeurs
(BFM Bourse) - Démonétisés depuis des lustres, les anciens emprunts chinois pourraient-ils devenir, entre les mains de Donald Trump, un levier dans les négociations face à la Chine ? Selon Bloomberg, le président américain a bien rencontré un collectif de créanciers. Les perspectives de recouvrement demeurent maigres, ce qui n'empêche pas des affairistes de profiter de la crédulité des porteurs.
Sur les sites consacrés aux titres de Bourse de collection (dépourvus désormais de toute valeur officielle, autre que ce qu'un "scripophile" est disposé à débourser pour le plaisir de contempler une pièce esthétique et/ou historique), la demande pour les titres financiers de la Chine pré-communiste va-t-elle décoller ? C'est déjà le cas aux Etats-Unis, à la faveur d'une inattendue campagne auprès de l'administration Trump de détenteurs de titres de créance parfois centenaires émis à l'époque impériale ou sous les différents régimes s'étant succédé en Chine de 1912 à l'avènement de la République populaire en 1949.
Selon un article de Bloomberg, le gouvernement américain s'est bel et bien penché sur la question de réactiver les demandes d'exigibilité des sommes, considérables, prêtées à la Chine dans le passé. Dans le cadre de la guerre commerciale à laquelle se livrent les deux puissances, restituer leur valeur faciale à des titres qui ne circulent plus officiellement qu'à titre d'antiquité ou de curiosité décorative (ou laisser simplement entendre qu'on pourrait le faire...) pourrait constituer un levier de négociation.
Juridiquement, aucune tentative pour faire valoir des obligations chinoises pré-communiste n'a abouti. Seule une action en nom collectif (class action) avait réussi à amener en 1979 la République populaire devant un Tribunal américain, dans le sillage d'une loi votée en 1976, le "Foreign Sovereign Immunities Act" permettant à une juridiction locale d'examiner des plaintes mettant en cause des gouvernements étrangers dans le cadre de litige commerciaux. Mais le Tribunal avait alors conclu que cette loi ne pouvait s'appliquer rétroactivement à des créances conclues plusieurs décennies auparavant.
Cela n'empêche pas certains détenteurs actuels -soit descendants de souscripteurs originaux, soit des personnes ayant acquis ces vieux titres "au prix du papier"- d'entretenir l'idée. Jonna Bianco, propriétaire d'un ranch à bestiaux dans le Tennessee, et cofondatrice de l'American Bondholders Foundation, a fait part à Bloomberg de sa rencontre "fantastique" avec le président Trump ("Dieu le bénisse"), en août dernier à Bedminster, l'un des golfs du président des Etats-Unis.
Citant une équipe de spécialistes recrutés par la fondation (dont un ancien secrétaire à l'Education sous Reagan), le montant de la dette dénoncée par la Chine s'élève à plus de 1.000 milliards de dollars en y ajoutant les intérêts et les pénalités, soit à peu près la totalité du montant des bons du Trésor américain actuellement détenus par la Chine. "Quel mal y aurait-il à rembourser la Chine avec son propre papier?", s'interroge-t-elle. Jonna Bianco dit avoir depuis rencontré Steven Mnuchin, le secrétaire au Trésor, et son équipe le secrétaire au Commerce.
Mais lorsque le gendarme boursier américain, la Securities and Exchange Commission, s'intéresse de son côté aux titres chinois anciens, c'est pour d'autres raisons : le fait est que certains margoulins n'hésitent pas à conforter les détenteurs dans leur marotte, pour mieux les berner. Ainsi, la SEC a accusé l'an dernier un pasteur et un prétendu conseiller financier d'avoir soutiré 3,4 millions de dollars à 29 épargnants, dont certains retraités qui y avaient englouti leurs économies, en les persuadant d'acquérir des obligations chinoises antiques en faisant miroiter des dizaines de millions de dollars de rendement. "En réalité, les titres n'étaient que des articles de collection sans valeur d'investissement", a rappelé la commission.
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