L'idée avancée par neuf associations de se fédérer pour « contrer » le rapport Bouton ne fait pas l'unanimité parmi les organisations représentatives des petits porteurs. Certaines ont d'ores et déjà pris leurs distances. Parmi elles, l'Adam de Colette Neuville.
Le monde associatif des petits porteurs se divise sur la stratégie à suivre
04 Octobre 2002
L'unité affichée par les associations de petits porteurs ne serait-elle qu'une façade ? Reçues fin septembre à l'Assemblée par Patrick Ollier, président de la commission de la Production et des Echanges, et par Pierre Méhaignerie, président de la commission des Finances, elles avaient annoncé leur intention de se fédérer pour « contrer » le rapport Bouton sur le gouvernement d'entreprise, réalisé à la demande du Medef et de l'Afep. Dix jours après, neuf de ces associations (1) confirment qu'elles vont présenter une charte « s'opposant à l'autorégulation imposée par le Medef ». Le renforcement des principes de transparence et de bonne gouvernance dans les sociétés cotées doit passer par la loi, « seule apte à garantir les libertés individuelles des petits épargnants spoliés et floués ».
Une démarche loin de faire l'unanimité dans le mouvement associatif qui défend les investisseurs individuels. La présidente de l'Adam (Association de défense des actionnaires minoritaires), Colette Neuville, qui s'était rendue à la réunion organisée à l'Assemblée, a vite pris ses distances. Au point de se faire directement attaquer dans le communiqué du collectif de la charte, publié mercredi, qui déplore sa « démarche solitaire ». Elle n'est pourtant pas la seule à s'interroger sur la stratégie de ces associations au passé et aux objectifs si différents. Viviane Neiter, vice-présidente de l'Apai (Association pour la promotion de l'actionnariat individuel), qui n'a pas participé à l'audition devant les députés faute d'y avoir été conviée, s'est aussi mise en retrait face à « une fédération des mécontents qui donne une image très négative de l'actionnariat individuel ». Au-delà des inévitables querelles de personnes, le regroupement en cours de constitution présente une physionomie pour le moins disparate. « Une véritable tour de Babel », note un observateur.
« Pédagogie » ou « polémique » ?
Quoi de commun entre un détenteur d'emprunts russes, la victime d'un agent de change et un actionnaire salarié ? A priori, pas grand-chose.
Pour eux, leurs motivations procèdent cependant d'un même combat : la protection de l'épargne populaire face à un système financier qui a « plombé la confiance » de millions d'épargnants. Cette vision implique une stratégie protestataire car il existe, selon eux, « une différence abyssale entre l'actionnaire minoritaire et le petit actionnaire ou petit porteur ».
C'est bien cette position que leur reprochent Colette Neuville comme Viviane Neiter, même si ces dernières ne sont pas exactement sur la même longueur d'onde. « Je refuse de transformer l'Adam en association de victimes », lance la première. « Je préfère me placer sur le terrain de la pédagogie plutôt que sur celui de la polémique », rétorque la seconde. L'une comme l'autre revendiquent le droit à la différence. « A quel titre un groupe pourrait-il s'approprier les 7 millions de petits porteurs ? Ces associations n'ont pas le monopole de la représentation », s'insurge encore Colette Neuville à la lecture du communiqué la mettant directement en cause. Pour l'heure, cette dernière a d'ores et déjà envoyé ses propositions à l'Assemblée nationale, sans attendre la présentation de la charte. Le député Patrick Ollier, qui doit mettre en place un groupe de travail sur le gouvernement d'entreprise, aura bien du mal à dégager un consensus au sein du monde associatif.