Les eurodéputés veulent limiter les risques de nouvelle crise en forçant la Commission européenne à réguler davantage le secteur financier, y compris les fonds spéculatifs.
Le Parlement exige des propositions avant la fin de l'année, dans deux rapports adoptés mardi avec une majorité telle que Bruxelles sera obligée d'en tenir compte.
"Il s'agit de créer les bases pour réduire le risque d'avoir une crise financière similaire dans les prochaines années", a commenté l'un des deux rapporteurs, le socialiste Poul Nyrup Rasmussen, qui argumente en faveur d'une "régulation maintenant pour éviter les crises futures".
Son texte exige des mesures couvrant tous les acteurs des marchés financiers, y compris les fonds spéculatifs ("hedge funds") et ceux de capital-investissement.
Les eurodéputés veulent tordre le bras au commissaire européen au Marché intérieur Charlie McCreevy, qui leur a encore assuré lundi soir qu'il n'y avait pas besoin de régulation pour les fonds spéculatifs, qui ne sont selon lui "pas la cause des turbulences actuelles".
Le commissaire irlandais a appelé à "ne pas faire l'erreur de percevoir toutes les activités des fonds spéculatifs comme une menace pour le marché", avançant que l'économie européenne aurait "besoin d'investissements massifs" dans un avenir proche et que sans les fonds, elle mettrait plus longtemps à se remettre de la crise.
Le commissaire, plutôt favorable à l'autorégulation, s'est contenté jusqu'ici d'actions minimales.
Il travaille par exemple à une meilleure surveillance des agences de notation ou à une modification des règles imposées aux banques, comme leurs obligations de fonds propres ou de transparence quand elles transforment des créances en titres vendus sur le marché ("titrisation").
"Jusqu'ici, quelques acteurs financiers qui pourraient faire s'effondrer l'ensemble du système ont eu la voie totalement libre", a critiqué l'eurodéputé socialiste allemand Udo Bullmann.
"Quand vous régulez, vous devez réguler pour tout le monde: les banques d'investissement, les banques commerciales, les fonds qui investissent dans des sociétés non cotées, les agences de notation...", a aussi souligné M. Rasmussen.
Son rapport préconise d'imposer à tous les acteurs du marché financier des exigences minimales de fonds propres, une plus grande transparence sur leur endettement, leurs sources de capitaux, leurs actionnaires, etc.
Il a balayé les craintes de voir les fonds fuir d'Europe, étant donné son poids économique.
Vu la gravité de la crise financière, conservateurs et libéraux se sont ralliés à la proposition socialiste.
"Nous avons atteint une situation où le pouvoir des banques et des hedge funds est presque tout autant hors de contrôle que les pouvoirs des syndicats dans les années 1970 et 1980", a commenté l'eurodéputé britannique Graham Watson, chef du groupe parlementaire libéral.
Pour lui, il est "juste de tirer profit de cette situation affreuse où des banques font faillite pour revoir fondamentalement leurs règles de fonctionnement et de supervision".
"L'UE doit s'exprimer de manière à la fois forte et unie", a aussi estimé le chef du groupe conservateur, Joseph Daul. Il faut selon lui "demander des comptes à nos partenaires américains" car "personne n'a rien contrôlé dans le système bancaire américain" et "tirer au sein de l'UE des leçons de cette crise en terme de réglementation des marchés financiers".
M. Watson a toutefois rappelé l'importance de trouver "le bon équilibre" en matière de supervision.
L'idée de créer un superviseur européen du secteur financier n'a ainsi pas abouti. Une déception notamment pour les Verts, qui ont voté en majorité contre le rapport.
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